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Que c'est beau la technologie...

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22 juillet 2017 6 22 /07 /juillet /2017 08:53

 

Demain, un de mes plus vieux potes arrivera au terme d'un de ces défis qu'il se pose régulièrement, histoire de voir qu'il n'est pas tout vide à l'intérieur. Demain, dimanche 23 juillet, mon ami Touffe va se lever avant le soleil, se diriger vers la plage de Nice, enfiler sa combinaison de natation et trois épreuves qui, prises séparément, me paraissent déjà hautement inhumaines: 3800 mètres de natation, 180 bornes à vélo dans l'arrière-pays niçois - qui n'est pas précisément d'une platitude batave - et un marathon dans les règles (42,195km) sur la promenade des Anglais.

Oui, Touffe va disputer un triathlon complet, connu sous le nom d'Ironman de Nice.

Oui, en ce qui me concerne, il est complètement frappadingue, mais je l'aime comme ça.

Du coup, quelques petites réflexions me viennent.

Tout d'abord, il faut savoir que le Touffe vise à terminer sa course en 16h.

Pour le "spect-acteur"1 que je suis, 16 heures d'effort continu, ça fait tourner la tête. Mais plus positivement, je me fiche qu'il le fasse en 16h ou en 16 jours. Il a déjà réussi. Il s'est astreint à un entraînement de dingue et à un régime alimentaire digne du fruit des amours d'un spartiate et d'une nonne contemplative. J'exagère à peine, c'est pas mon style. Il va prendre part à cette course, avec quelques centaines d'autres allumés du bulbe comme lui, il va se faire une méga-dose d'adrénaline, d'endorphines et autres trucs (naturels) en -ine, et pour tous ces joyeux cinglés, c'est parfaitement normal.

Il a déjà réussi.

Et moi qui suis en train de préparer les bagages pour aller rôtir au soleil de Toscane en me désolant du fait que je ne vais plus nager parce que les piscines sont bondées de gamins en stage pendant l'été, moi qui regarde repousser mon bide, je pense à lui, à la tension qui monte, au trac peut-être, et puis à l'après. Quand on arrive au terme d'une épreuve comme celle-là, une épreuve qui a commencé le 15 janvier, quand on y pense (16 heures, mon œil !), on se demande ce qu'on va bien pouvoir faire de sa vie après. Au hasard, gravir la Cordillère des Andes à vélo, traverser la Manche à la nage ou s'inscrire à un concours de mangeurs de cassoulet (cherchez l'intrus).

J'aimerais pouvoir lui enlever ces angoisses. Je voudrais être le chirurgien capable d'effectuer une ablation de la glande du questionnement perpétuel. Mais je ne suis pas chirurgien. Pas plus que triathlonien d'ailleurs. Tout ce que je sais, c'est que demain, il verra qu'il n'est pas seul. Il y a ses trois plus fidèles supporters (Valérie, Hadrien et Ea), il y a la foule qui lui criera des encouragements, et il y a tous les autres participants : les fusées qui vont faire ça en douze heures, ceux qui vont rester dans son entourage proche pendant toute la course et ceux qui termineront derrière. Pour tous ceux-là, c'est déjà fait. Le but, c'était de faire le voyage. Ce sont tous des Ironmen.

Il a déjà réussi.

Demain, je suivrai sa progression grâce à la technologie moderne. Quand je ne serai pas en train de conduire, je regarderai sur mon téléphone le site de l'Ironman (http://ironman-results.r.mikatiming.de/2017/nice/) et ce ne sera que peu de chose pour pouvoir le soutenir.

Il n'y a pas grand-chose d'autre à faire. Touffe, souviens-toi de boire souvent, souviens-toi qu'il y a des gens qui pensent à toi et alea jacta est, ce que ma grand-mère traduisait par « toute jactance est inutile ».
 

_____________

1 Ben oui, je me suis tellement tenu au courant de son entraînement et de ses progrès que je suis parfois fatigué rien qu'à l'entendre décrire ce qu'il a déjà parcouru en entraînement... Imaginez qu'il ait pédalé jusqu'Agadir, puis couru jusqu'au parc national de Khenifiss et puis encore nagé 128km. Vous avez ce qu'il a cumulé en 7 mois d'entraînement. Forrest Gump, quelle klette !

 

 

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18 mars 2016 5 18 /03 /mars /2016 17:13

Ou à tout le moins, il doit me manquer quelques éléments pour comprendre le foutoir dans lequel notre civilisation est en train de s'enfoncer à une vitesse qui défie l'imaginaire.

J'ai grandi dans l'idée que l'Europe de l'après-guerre s'était unie au-delà de ses différences afin de renforcer la solidarité, afin de ne plus se heurter aux replis sur soi, aux nationalismes et à la bêtise haineuse qui l'avaient précipitée dans la guerre, l'horreur génocidaire et la négation totale de ce qui avait été défini comme "Humain" un siècle et demi auparavant par des Voltaire, Diderot, Rousseau ou John Locke. "Plus jamais ça", qu'ils disaient... Non content d'y grandir, j'ai étudié le sujet, débattant de nombreuses fois sur la priorité à apporter à cette Europe: plus large ou plus profonde, plus de pouvoir aux Etats-membres ou plus de pouvoir aux Institutions, établir l'Europe de l'Atlantique à l'Oural ou rester sur un schéma de guerre froide qui arrêterait l'Union à la ligne Oder-Neisse. Quelle que soit l'option, l'objectif était identique, ne plus avoir le vertige en se regardant le nombril.

A quel moment ai-je bien pu fermer les yeux suffisamment longtemps pour que m'échappe ce changement radical de mentalité et de fonctionnement ? Quand, précisément, a-t-il été décidé de revenir vers une mentalité de frontières, de murailles, de forteresse, d'aristocratie du monde ? Il est bien évidemment illusoire de penser que ça se fait en un claquement de doigts. Quand la bête immonde revient, elle ne sonne pas l'alarme. Elle s'insinue, elle pollue subrepticement les consciences suffisamment lentement pour que personne ne constate le changement. Et puis un jour, elle est installée. Elle est là et ça paraît normal à tout le monde. Et ceux qui crient encore au loup passent pour de folkloriques agitateurs.

Mais cette mentalité moyenâgeuse est bel et bien réinstallée: on ne peut pas accueillir toute la misère du monde. Protégeons-nous contre l'envahisseur qui vient occuper nos vertes campagnes et faire une joyeuse partie de camping dans notre pré carré !

Du haut des murailles immaculées de la forteresse Europe, lorsque le ciel est clair, nous pouvons apercevoir au loin les bombes qui tombent sur les maisons syriennes. En fermant à moitié les yeux, nous pouvons voir les violations flagrantes de la Déclaration Universelle des Droits de l'Homme et de la Convention de Genève, nous pouvons voir les populations civiles humiliées, déportées, massacrées. Mais nous ne voulons pas les voir de plus près ! Nous avons d'autres soucis, infiniment plus importants: nous avons des banques à sauver, nous devons préserver le fonctionnement de surinvestissement boursier qui garantit notre mode de vie. Oui, oui, celui qui épuise les ressources de notre planète de plus en plus vite, de plus en plus irréversiblement.

Mais surtout, nous voulons nous préserver de l'autre, du différent, de l'étranger, barbare, déparant les "racines chrétiennes de l'Europe".

Alors, pour ce faire, nous renonçons à tout l'héritage d'accueil, de solidarité, de tolérance et d'amitié entre les peuples. Nous traitons ces populations qui demandent de l'aide comme des parasites. Pour ne pas avoir l'impression de violer (une fois de plus) la convention relative au statut des réfugiés, nous leur donnons le doux euphémisme qualificatif de "migrants". Nous les laissons vivre dans des conditions qui feraient vomir un coprophage. Et non content de ça, nous, Européens, enfants de l'exode, de la guerre et de la Shoah, nous qui oublions que, tels les aristocrates, nous ne devons notre confort qu'au hasard d'être né quelque part, nous nous gargarisons de la conclusion d'un accord d'échange "un contre un" avec un partenaire aussi "sûr" que la Turquie d'Erdogan, réputée pour son respect sans tache des Droits de l'Homme !

Comme le disait Philippe Hensmans, Président d'Amnesty International Belgique mardi dernier à la RTBF: "Dire à des réfugiés syriens que la Turquie est un pays sûr, c'est comme dire à des juifs en 1937 que l'Autriche est un pays sûr". Je suis persuadé qu'on va lui reprocher le caractère outrancier de ses propos. Mais c'est normal : il crie au loup, et c'est un folklorique agitateur qui ne devrait pas se lancer dans de telles polémiques.

Ne lui jetez pas la pierre, je suis derrière.

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23 avril 2015 4 23 /04 /avril /2015 20:25

 

Cette journée avait commencé comme toutes les autres, dans un mélange de sommeil et d'agitation, de planification et d'insouciance. Elle n'avait rien de particulier

Tiens ? le ciel est bleu...

Il n'y a que dans les films qu'on se lève avec un drôle de pressentiment que quelque chose de grave va se passer à 300 bornes d'ici.

On dit que tout le monde se souvient de ce qu'il faisait quand il a appris l'assassinat de Kennedy ou en voyant les avions percuter les tours jumelles.

J'étais au volant. Il était midi. Le journal – court – à la radio se termine par une dernière minute : des échanges de tir ont eu lieu Boulevard Richard Lenoir, à Paris, dans le 11e arrondissement.

Je me souviens avoir pensé à deux choses : un fait divers de plus de la violence ordinaire. Boarf... Beurk... et aussi que le « Richard Lenoir », ça me faisait penser à « Nini Peau d'Chien ».

C'est mercredi : les enfants rentrent tôt de l'école et il faut leur faire à manger.

Quelques heures plus tard, c'est la réalité qui vous pète à la gueule, qui vous assèche la bouche, qui vous paralyse, vous emballe comme dans de la laine. Mais de la laine de verre. Vous voudriez en sortir, mais plus vous vous débattez, plus ça vous coupe, vous brûle et vous blesse.

Je me souviens alors du jour où j'ai appris la mort de Coluche et du même cortège de sensations. Immédiatement après, je me souviens que le matin même, en voyant ses « Pensées » dans ma bibliothèque, je me suis demandé si on prononce « Volinsski » ou « Ouolinnchki ». Une journée d'insouciance comme une autre, je vous dis.

A présent, je me dis qu'il s'en cogne comme de sa première couche, lui. Et que moi, je n'aurai jamais sa réponse.

Je connais Wolinski parce que j'ai 40 ans et qu'il a été incontournable dans ma jeunesse, comme le furent Reiser, Gotlib ou Franquin. Je connais Cabu parce que, minot, je regardais Récré A2 et que je préférais ses dessins d'un grand dadais un peu ahuri à ceux de Goldorak ou de l'Inspecteur Gadget.

Je ne peux pas dire que j'étais fan, que je les ai suivis à la trace. Par contre, j'ai toujours été en faveur de la liberté d'expression et quand Charlie Hebdo a reproduit les caricatures – aussi célèbres que mauvaises – du journal danois au nom imprononçable, j'ai pris leur parti, parce que Voltaire disait les choses bien mieux que moi : « Je ne partage pas vos opinions, mais je me battrai pour que vous puissiez les défendre. »

Je ne me suis pas abonné à Charlie Hebdo, même en signe de soutien. Parce que s'abonner, c'est s'enchaîner, ce qui n'est pas, vous en conviendrez, le meilleur moyen de militer pour la liberté.

Alors, je me suis contenté de « liker » leur page sur Facebook et je voyais leur couverture hebdomadaire, ainsi que celles auxquelles on a échappé, régulièrement, dans le flot, comme tout le reste. Ô ironie, leur irrévérence me semblait faire partie de mon quotidien. Je marinais dedans, au rythme de mon activisme de salon, dans la torpeur programmée des échanges d'informations organisés pour le profit d'une entreprise de Big Data.

Alors, me direz-vous, si je ne suis qu'un lambda, qu'un anonyme qui n'a pas fait rempart de son corps devant l'innommable, ni hier, ni jamais, pourquoi cette prise de parole ? Pourquoi ces mots ?

Tout d'abord, pourquoi pas ?

Ensuite, parce que je ne veux pas oublier ce 7 janvier 2015. Parce que si j'avais su dessiner, c'est en premier lieu chez Charlie Hebdo que j'aurais envoyé mes croquis et que maintenant qu'il est trop tard pour devenir un héros ou un martyr, il est peut-être, il est enfin temps de se lever de son divan et de se bouger le derche avant de crever dans ses pantoufles.

Mourir assis, encore pire que vivre à genoux...

Je ne veux pas oublier que j'aurai été témoin direct de l'horreur de la liberté assassinée, massacrée par des êtres stupides et lâches, s'appuyant sur la mollesse grandissante de la société non-combattante dans laquelle nous vivotons, pépères.

Plus jamais ça, qu'ils disaient...

Je n'étais pas né quand la junte chilienne a brisé les mains et pris la vie de Victor Jara, je n'ai pas vécu de censure efficace ni de lynchage. Jusqu'à ce 7 janvier 2015.

Est-ce que ce jour marquera le début d'une voie vers un engagement plus marqué ? Sera-ce le catalyseur de l'expression d'indignations – petites ou grandes – dont j'espère que de plus talentueux les reconnaîtront comme valables ?

Je ne sais pas.

Mais je sais que les crétins décérébrés qui ont prétendu rendre hommage à leur prophète se fourrent le doigt dans l’œil jusqu'au coude : ils n'ont pas tué Charlie, ils l'ont rendu immortel. Et ça, ça vaut tous les bras d'honneur du monde, brandis à la face de la bêtise universelle !

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15 mai 2012 2 15 /05 /mai /2012 16:31

Ce lundi 14 mai était un moment important à l'ULB: la remise des insignes de Docteur Honoris Causa à quatre personnalités scientifiques et à trois personnalités dont l'action et l'engagement ont marqué l'Histoire et qui sont en parfaite corrélation avec l'esprit (libre) que promeut mon Alma Mater (c'est promis, c'est la dernière fois dans cet article que j'utilise ce latinisme trop facile).

Les trois personnalités sont  Ela Bhatt, fondatrice du syndicat indien/banque coopérative/organisme de micro-crédit SEWA (Self-Employed Women Association), Costa Gavras, cinéaste, auteur entre autres de "Z", "Music Box" et "Missing" et, last but not least, Angela Davis, ex-égérie des Black Panthers, philosophe et figure de proue de toutes les luttes contre les discriminations et les enfermements de toutes sortes.

Autant dire qu'en décidant d'y aller (mon amour, je ne suis que presque désolé de t'avoir laissée toute seule à la maison avec les enfants...), je savais que je ne risquais pas de m'endormir ni de partir avant la fin...

J'y allais aussi, sans vergogne, pour entendre la formation musicale dirigée par l'excellent Dominique Jonkheere.

Dans un cas comme dans l'autre, je n'ai pas été déçu.

Quelle émotion ! Quel plaisir de voir que l'ULB a pu non seulement désigner des DHC en fonction du parcours de leur vie plutôt que dans l'émotion de l'instant* mais aussi mettre un peu de vie et de spectacle dans une cérémonie qui, sans cela, n'a d'amusant que la partie en latin (comme la messe).

J'y allais aussi confiant du fait que le service d'ordre, échaudé par de récents événements en ces murs, aurait soin d'empêcher les terroristes intellectuels les éventuels trublions de déranger une cérémonie aussi chargée de symbole.

Et là, je n'ai presque pas été déçu.

 

Presque?

 

Ben oui... Fallait bien quelque chose qui ne tournât pas rond...

 

Dominique J. et ses petits camarades m'ont régalé les oreilles et réchauffé le cœur avec des choix musicaux magnifiques et des orchestrations du même tonneau.

Lorsqu'Angela Davis, star à peine voilée de la soirée eut fini son allocution, l'orchestre a entonné "Sweet Black Angel" des Rolling Stones, composée dans la vague de protestation qui avait pour but de la faire sortir de prison à la fin des années soixante (16 mois quand même!)**

A ce moment, j'entends derrière moi un petit remue-ménage: une dizaine de gugusses se sont levés et, courageusement masqués, brandissent un poing ganté de noir. Ils restent là, silencieux et immobiles.

Je reprends ma position initiale, un peu gêné, comme par le bruit d'un moustique pendant le sommeil, et j'observe la réaction des autorités académiques: le Recteur ne semble pas les avoir remarqués. Le Président du Conseil d'Administration les observe un bref instant d'un œil quelque peu méfiant puis redirige son attention vers l'orchestre. Angela Davis, elle, n'a d'yeux que pour la musique.

Soyons clairs: j'ignorais l'essentiel de la biographie de Madame Davis. J'ignorais même qu'elle vécût encore. Je n'en connaissais que son action au sein des Black Panthers. Mais je me dis quand même que ces quelques jeunes gens ont dû se sentir bien seuls...

D'abord, ils n'ont pas réellement suscité l'attention qu'ils désiraient sans doute au fond de leurs petits cœurs fâchés. Ensuite, après avoir découvert "le reste" de la vie d'Angela Davis, j'ai l'impression qu'ils ont raté leur cible en récupérant un geste symbolisant la violence et un certain rejet de l'autre, geste que, si elle ne le regrette pas, "Sweet Black Angel" a quand même réussi à dépasser ou à transcender, par un engagement prolongé et une évolution dans sa vie.

Enfin, et surtout, ils ont dû se sentir bien seuls parce que, sans voir leur ploufesque démonstration, tout l'auditoire Janson battait des mains au rythme de la musique. Et ça, ça faisait chaud au cœur.

Je suis d'accord avec Angela Davis et avec le Président du Conseil (dans son discours de clôture): il reste bien des combats à mener, mais la musique qui unit, qui rassemble et qui réjouit est sans doute la plus belle arme. Et la moins dangereuse.

 

______________

*Staline a été fait DHC au sortir de la guerre. D'accord, il avait contribué à vaincre l'Allemagne nazie, mais il a allègrement progromé quand même.

Ingrid Bétancourt, dont la première visite à sa libération a été pour... le Pape est également DHC.

On peut également citer l'opposante à Ceaucescu Doina Cornea, réactionnaire anti-libre choix sur l'avortement et passablement antisémite

**D'autres aussi fameux se sont engagés dans cette vague: Aragon, Lennon et Prévert pour ne citer qu'eux.

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20 mai 2010 4 20 /05 /mai /2010 16:26

Voilà quelque temps que je me désole de l'aseptisation forcenée de la société dans laquelle nous vivotons. Comme je l'ai lu il y a peu, si Desproges avait osé aujourd'hui le tiers du quart de ce qu'il a fait avant de partir vaquer à d'autres occupations, il aurait été crucifié en direct. Avec un jury en prime-time, des pubs partout et un animateur hystérique luttant pour l'occupation de l'antenne contre une voix off basse et dramatique à souhait.

Etrange paradoxe que celui qui accepte le spectacle de la mort en direct, réelle ou figurée, mais qui condamne le moindre écart de langage. Les assoiffé(e)s de célébrité bon marché que sont les candidats de télé-réalité renoncent à toute protection de leur vie privée pendant et après leurs 15 minutes de gloire, mais la loi sur la même protection de la vie privée s'affiche plus souvent que le 1er article de la Déclaration des Droits de l'Homme... La moindre minette qui se veut chanteuse est habillée comme les plus hard des actrices de porno chic: cuir, fouet, maquillée comme une voiture volée et entourée de mâles virils et huilés, à quatre pattes et soumis comme les brebis que leur cachet fait d'eux. Mais c'est pas du sexe hein ! Nooooonnn ! Le sexe, c'est ce qui est mal, qu'il faut éloigner de nos chères têtes blondes, à qui on enseigne l'abstinence et qu'on maintient dans une bienheureuse ignorance des choses de la vie le plus longtemps possible. Les clips vidéo, c'est du divertissement.

Et si Desproges est crucifié, il faut se dire que Buck Danny est en prison parce que l'homosexualité dans l'armée américaine est toujours un crime et Tintin a le Centre pour l'Egalité des Chances et les mouvements anti-racistes sur le dos. Et ne parlons pas de Gaston qui a bien dû se résoudre à devenir un jeune cadre dynamique parce que c'était ça ou la porte quand la World Company a racheté les Editions Dupuis. Je parie qu'Astérix est devenu Gallo-Romain bien intégré dans le tout Lutèce et qu'Obélix a fait un régime (liposuccion, entraînement cardio 9 fois par semaine et tout le toutim) et engagé un consultant en relooking parce que ses tresses, ça fait vraiment ultra-ringard.

Pas plus tard que ce soir, j'entendais Mick Jagger dire qu'il est toujours possible d'être "Rock'n'Roll" aujourd'hui.

Je n'en crois pas un mot. Il est toujours possible d'être un grand artiste et une incroyable bête de scène. Mais la rock'n'roll attitude, rebelle, audacieuse, vivant complètement hors limites, se foutant des règles, se moquant ouvertement du système, elle, est bien morte, assassinée par les relents du business, du pognon que rapporte une carrière rondement menée de compromis en arrondissements d'angles. Il y a d'ailleurs longtemps qu'ils ont compris l'intérêt de surtout ne pas changer un iota à ce qu'ils ont toujours fait. Rien ne ressemble plus aujourd'hui à un concert des Rolling Stones qu'un autre concert des Rolling Stones... C'est le conformisme poussé à l'extrême.

Et qui que ce soit qui essaierait quand même de casser les barrières se verrait bien malgré lui "sauvé" par le système. Quand au hasard de mes pérégrinations zappesques je tombe sur les diffusions de matchs de catch, je ne peux m'empêcher d'être surpris par les mises en garde signalant qu'il ne faut pas le faire à la maison parce que c'est dangereux. Dédouanement facile et bon marché vis-à-vis de potentiels procès parce qu'un plus idiot aurait tenté de lancer son petit frère par terre. Regardez mon spectacle, mais ne le prenez pas en exemple. Aimez-moi, mais ne vous identifiez pas à moi. Et c'est tout le processus fondateur de l'art de montrer depuis Euripide et Sophocle* qui est réduit à néant.

Quelle est l'utilité de l'art si ce n'est de provoquer soit l'attachement, soit la répulsion?

Par ailleurs, tout cela ne date pas d'hier: vous rappelez-vous cette histoire de la mémère qui avait mis son chien à sècher dans le micro-ondes? Légende urbaine ou pas, quel fabricant oserait encore ne pas mettre une armée de légistes à la tâche pour s'assurer que toutes les précautions ont bien été prises pour ne pas risquer le procès qui lui coûterait des millions?

L'aseptisation naîtrait-elle de la paranoïa ambiante? Ou au contraire est-ce le principe de précaution poussé à ses extrémités qui nous fait vivre dans cette peur constante du jugement, de la marginalisation, de la faute et du péché?

Un soir dans le train, j'ai entendu des étudiants partant en guindaille chanter... la Brabançonne. L'originale. Pas celle qui raconte les tribulations d'une fille de joie. Je me suis demandé où avait disparu ce que je considérais comme le dernier bastion de l'insouciance et de la liberté de choquer.

Allez, juste pour que vous ne partiez pas les mains vides:

[Air: la Brabançonne]

Je me souviens lorsque j'étais jeune fille

D'un jeune garçon qui passait par bonheur

Il me trouva si jeune et si gentille

Qu'il me fit voir sa grosse pine en chaleur

Et soudain sous mes jupons s'élance

L'énorme queue qu'il tenait à la main

Il déchira mon voile d'innocence

 

Voilà pourquoi je me suis fait putain (3x)

 

 

_____________

*Que les vénérables maîtres de la tragédie me pardonnent de les avoir comparés aux affligeances qu'on nous propose aujourd'hui...

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11 mars 2009 3 11 /03 /mars /2009 14:59

A quoi sert le "i" de "oignon" ? 
Pourquoi y a-t-il une différence entre un cuissot de chevreuil et un cuisseau de veau?
Saviez-vous qu'on peut maintenant parler des z'Hollandais qui taillent leurs z'haies et mangent des z'haricots?

Le Parlement de la Communauté Française de Belgique envisage, à pas de loup, de lancer une nouvelle réforme de l'orthographe. But annoncé: réduire la fracture orthographique, qui est une porte cochère de la fracture sociale. Il s'agit d'augmenter l'accessibilité à l'enseignement et d'amener la démocratisation de l'école sans se contenter de gonfler artficiellement le nombre d'enfants qui y ont accès. Les parlementaires ont appelé ça "prendre le mal à la racine".

Lequel Racine doit sans doute déjà se retourner dans sa tombe... Personne n'a, semble-t-il, levé l'objection de la trace historique que représente l'orthographe dans la langue et, partant, dans la culture. Dis-moi comment tu écris, je te dirai d'où tu viens...

Mais pour réduire une fracture sociale, on crée une fracture culturelle.
On nous assure que "la langue classique existera en parallèle". Où? Dans les universités, les "hautes sphères", là où tout le monde n'a pas accès. Les autres, les laissés-pour-compte, les "sans-stylos" écriront en langage sms, s'ils écrivent encore.
Le nivellement par le bas a encore frappé.

Dans une recherche sans cesse recommencée de résultats spectaculaires, identifiables et (auto-)attribuables, les parlementaires se rattachent une fois de plus à des solutions immédiates et boîteuses, sans s'attaquer, quoiqu'ils en disent, au fond du problème: la revalorisation de l'enseignement au sein des consciences collectives. Oui, l'orthographe est enseignable au même titre que l'algèbre et la géographie. Oui, son apprentissage nécessite un effort de la part de l'élève et une volonté farouche d'obtenir des résultats de la part de l'enseignant.
Non, ce n'est en aucun cas une malédiction à laquelle échappent quelques bienheureux prédestinés.
Et ce n'est certainement pas en donnant l'illusion que la difficulté est supprimée qu'on améliorera l'avenir des élèves en difficulté.

Au mieux, on améliorera leur présent. Vous avez dit "immédiat"?

On pourra par ailleurs se poser la question des conséquences pour la langue elle-même.

Sans blague? "Ognon" parce que personne ne sait vraiment plus d'où vient ce "i"? Et le "gn" alors? Allez, "Onyon". Et on n'en parle plus...
On pourrait aussi supprimer l'accent circonflexe. De toute façon, on ne sait jamais où le placer... Et tant qu'à faire, supprimer tous les accents, toutes les lettres inutiles (ces "h" en début de mot, ces "cécédille", etc.), celles qui provoquent les fautes d'orthographe, et j'en passe...
Je connais des amateurs de Scrabble® qui vont rigoler!

Plagiant donc Desproges en un sanglot, on pourrait donc dire "réjouissons-nous, nous vivons une époque formidable où nous avons résolu tous les vrais problèmes de l'humanité en écrivant un chat un chas".

Mais de la part d'un pays qui a institutionnalisé des mots comme "Bozar" et "Cinématek", on ne doit plus s'étonner de rien...

Bon, allez, puisque vous avez lu jusqu'ici, je vous file l'adresse d'un site qui propose quatre dictées quotidiennes (les quatre boutons en haut à gauche). Copiez-collez, corriger les fautes et puis obtenez la correction.
Quelques minutes par jour pour se faire fonctionner le cortex, ça ne peut faire de mal à personne. http://www.pause.pquebec.com/dictee.php

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14 janvier 2009 3 14 /01 /janvier /2009 13:33
Ce matin, la séquence "Nouvelles Technologies" de la Première parlait du fait que certains sites d'actualités ont coupé la possibilité de poster des commentaires en réaction à un article. La "situation" dans la Bande de Gaza exacerbe tellement les extrémismes que de nombreux appels à la haine ont été constatés. Les sites ont donc préféré courageusement se retrancher derrière une censure générale plutôt que derrière une vigilance active.
Passons...

Pascal Belpaire, responsable de Actu24 s'est exprimé en ce sens et Yves Thiran, chef de rédaction des nouveaux médias à la RTBF, l'a fait en ces mots: "On n'ouvre pas les articles aux commentaires et [...] vu la nature conflictuelle du conflit..."

C'est vrai que des conflits pacifiques, on n'en entend pas souvent parler. A part la bataille d'Iwo Jima, bien sûr...
 

L'intégralité de la séquence, ici.
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18 décembre 2008 4 18 /12 /décembre /2008 14:20
Je commence aujourd'hui une nouvelle catégorie: la revue de presse. Vous trouverez-ici les âneries, les trucs comiques ou tout ce qu'il me plaira de relever dans la presse, écrite, parlée ou par signaux de fumées (quoiqu'il faudra que je révise ma grammaire en la matière...)

Inaugurons donc avec ce que j'ai lu dans Métro d'hier, à propos du film "Australia": "Luhrmann cite pour ainsi dire tous les clichés des [...] films de guerre mélodramatiques hollywoodiens des années 30 et 40, avec "Autant en Emporte le Vent" ("Gone with the Wind") pour principal exemple. Kidman est manifestement sa Vivien Leigh et Jackman son John Wayne. [...] Grandiose"

En effet.
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11 décembre 2008 4 11 /12 /décembre /2008 10:44

"La pensée unique ne doit jamais se soumettre, ni à la raison, ni au pluralisme, ni à la plus élémentaire tolérance. Parce qu’il ne faudrait tout de même pas qu’elle puisse cesser d’être, nom de nom !!"

Que Poincarré me pardonne cette dérivation scandaleuse de sa jolie phrase (qui ornait le mur de la chambre où je dormais chez mes grands-parents), mais j’ai récemment assisté à un échange – que dis-je, une joute ! - e-pistolaire entre quelques porte-ton-dard des valeurs d’une certaine institution universitaire bruxelloise que je fréquentai jadis, tant pour la fraîcheur de ses blondes (les filles) que pour la tiédeur de ses brunes (les bières).

Et comme tous les représentants de cette étrange espèce, ils sont persuadés d’être les seuls détenteurs de la vérité. Ca commence bien, en matière de pluralisme…

 


Petit test : prenez un étudiant ULBiste de base, de préférence affublé d’une penne, mais on peut s’en passer. On peut aussi recruter dans les cercles politiques, c’est encore plus drôle. Demandez-lui une définition du Libre-Examen (de préférence dans un train, un tram ou un bus, afin que le bourgeois qui assiste à la conversation depuis la banquette d’en face puisse y aller de son commentaire paternaliste et d’autant plus à l’emporte-pièce qu’il n’était pas sollicité*). A présent, régalez-vous en entendant le bleu vous réciter, le torse fier et l’œil bombé que « le Libre-Examen postule en toute matière le rejet du dogme et de toute vérité révélée et euh… après je sais plus par cœur tu vois, mais en gros c’est ça… »

 

Amen. Ite, missa est. Va en paix, mon frère qui sortis d’Egypte. Le veau d’or est toujours debout et le serpent du dogme s’est mordu la queue.

 

Cette phrase, la première de l’article 1 des statuts de l’Université Lîîîîîîîbre de Bruxelles, aurait pu – aurait dû – être gravée sur le fronton du temple.

 

Ayant été moi-même ce bleu (tardif), ce bourgeois (précoce) et ce testeur d’endoctrinement, j’ai accompli le cycle, je fus chrysalide et je suis René le phénix. Mais j’aimerais ne pas être un moraliste, forçant la foule qui me lit, la larme à l’œil et la bouche sèche, à avaler une autre définition, tout aussi artificielle et figée dans l’imperfection sémantique qui est le propre de l’Humain : les mots.

Non, n’insistez pas, pauvres papillons de nuits piégés par mon ampoule ! Arrière, femme impudique ! Couvre ce sein, certes opulent, mais qui ne me détournera pas de mon droit chemin, sur lequel, moi aussi, je marche seul.

 

Revenons-en à nos… moutons.

L'histoire est simple: le chœur de l'ULB (dont je fis partie) chante des morceaux de musique classique (Mozart, Mendelsohn, Offenbach, Britney Sp... non, j'déconne) et aussi des chants yiddish et des gospels. Il s'est trouvé une personne pour contester, de manière assez virulente, cette dernière partie du répertoire, en raison de son message quelque peu orienté "chrétien". "Mensonges de vendeurs de paradis" et autres agressions verbales teintées, comme souvent, d'ignorance et de certitudes.

Qu'on affirme ou non ses croyances et ses convictions personnelles, c'est l'affaire de chacun.
Par contre, j'ai un peu de mal avec les gens qui dirigent leur colère vers l'innocent. C'est bizarre comme ceux qui crient le plus fort "A bas la calotte" sont souvent les plus circoncis du bulbe.
J'ai vraiment un gros problème avec les despotes. "Changez le répertoire, je ne l'aime pas". J'ai tendance à répondre "Si tu n'aimes pas, change de crèmerie". Il y a des tas de gens qui ne me manquent pas: tous ceux avec qui je n'ai pas d'atome crochu. Et croyez-moi, il y en a des pelletées !

Mais ce pathétique épisode d'égocentrisme forcené a éveillé en moi une réflexion, que je vous fais partager avec grand plaisir: qu'il soit libre-penseur, fondamentaliste musulman, catholique, juif, adventiste du 13e jour ou rose avec des étoiles vertes, un ayatollah reste un ayatollah.
_____________
*Je vous jure que c'est du vécu

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31 octobre 2008 5 31 /10 /octobre /2008 14:29

Il faut croire que dans la carrière d'un acteur, il est indispensable d'avoir interprété un criminel notoire. Comme Pacino a fait son Tony Montana, comme Newman a fait son Billy the Kid, comme Astérix a été assassiné par Cornillac, Cassel a fait son Mesrine.

Je ne sais pas ce que ça donne… Je ne suis pas allé au cinéma depuis le décevantissime "Dark Knight". Et j’ai d’autres priorités dans les salles obscures : il y a… euh… "High School Musical 3" mais il faut absolument que je revoie les premiers pour me remettre toute l’intrigue en mémoire…

 

Mais je pensais que si la France aime se retourner sur ses criminels avec un plaisir morbide et romantique, on pourrait imaginer une franchise en noir-jaune-rouge. Je vois ça d’ici :  "Patrick Haemers, l'instinct de mort / la prison m'a tuer", "Les Tueurs du Brabant Wallon, l'instinct de mort / cours après moi Sherif", "Bart De Wever, l’instinct de mort / Il y a des candidats pour tenir le flingue ?"

 

Ca nous changerait des frères Dardenne, de leur ciel si gris qu’un connard s'est pendu et du bassin sidérurgique de la région Liégeoise. On bouge dans le pays, plus loin que le nord. Ou que si j'étais dans le nord, c'était loin...

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